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Mali, Accaparement de la forêt du Mandé à Kita. Plus d’une centaine de villages menacés de disparition

Dans le cadre d’une mission de soutien, d’information et de sensibilisation, auprès de ces membres l’Union des Associations et des Coordinations d’Associations pour le Développement et la Défense des Droits des Démunies (UACDDDD) a dépêché du 22 au 24 février dernier une délégation dans 4 villages des 03 Communes du cercle de Kita se trouvant dans la forêt qui l’objet d’une convoitise énorme. Aujourd’hui, ils sont plus d’une centaine de villages qui sont menacés de disparition dans les communes de Gadougou 1, Gadougou 2 et Koulou. Toute chose qui interpelle fortement Mme le ministre de l’Environnement, de l’Assainissement et du Développement Durable, Keïta Aïda M’BO.

A cause de la menace qui pèse fortement sur les populations des trois communes du cercle de Kita à savoir: Gadougou 1, Gadougou 2 et Koulou se trouvant dans la forêt naturelle du Mandé, une délégation de l’Union des Associations et des Coordinations d’Associations pour le Développement et la Défense des Droits des Démunies (UACDDDD) a sillonné ladite forêt qui fait aujourd’hui l’objet d’une forte tension entre les populations qui résident dans la localité et un français du nom de Christophe qui serait le concessionnaire principal pour la gestion de cette forêt pendant une durée de 20 ans. C’était du 23 au 24 février 2017. L’objectif de la présence de cette délégation de l’UACDDDD dans la localité était de s’enquérir du problème et apporter le soutien et l’accompagnement de l’Union aux victimes de cette situation qui dépasse l’entendement des uns et des autres et cela à travers l’information et la sensibilisation.

Faut-il le rappeler, cette forêt dont la valorisation coûtera la disparition de plus de 100 villages est située dans la zone du Mandé, précisément dans les 03 communes du cercle de Kita citées ci-haut. Cette délégation de l’Union des Associations et des Coordinations d’Associations pour le Développement et la Défense des Droits des Démunies (UACDDDD) était conduite par Siaka Traoré, en charge de sa commission scientifique, et composée d’autres responsables de ladite Union à savoir : Taka Méminta, le chargé des affaires juridiques, Sékou Samaké et Boubacar Samaké, tous membres du bureau de l’UACDDDD.

Partout où la délégation a passé, de Gallé à Krigagna, en passant par Limakolé et Galissindé, la délégation a été accueillie en grande pompe par les populations. Toute chose qui manifeste l’intérêt et l’attachement de celles-ci à leurs terres sur lesquelles leurs ancêtres ont vécu il y a maintenant des siècles.

Partout où la délégation de l’UACDDDD a passé, ce sont les mêmes préoccupations et les mêmes désirs qui sont évoqués. Nous ne voulons que nos terres. Nous acceptons de périr tous que de quitter sur nos terres. Il n’est pas question de déplacer nos villages. Ces propos ont été recueillis dans tous les villages sillonnés par la délégation de l’UACDDDD. C’était à la faveur des différentes Assemblées Générales tenues dans les différents villages.

Lors des différentes Assemblées Générales, organisées par les chefs traditionnels et coutumiers desdits villages, le Chef de la délégation de l’Union des Associations et des Coordinations d’Associations pour le Développement et la Défense des Droits des Démunies, Siaka Traoré, a fait une brève présentation de son Association et les missions qui lui sont assignées, puis l’objectif de la présence de sa délégation dans la zone.

A cette occasion, Siaka Traoré dira que l’UACDDD est l’Union de 287 Associations et des Coordinations d’Associations pour le Développement et la Défense des Droits des Démunies. Elle a pour mission principale de défendre les droits des pauvres et de les protéger contre les accaparements de leurs terres, d’où les raisons de cette mission de prospection, d’écoute, de soutien et d’accompagnement des victimes, a-t-il ajouté.

Le Chef de délégation a laissé entendre que la présence de cette délégation de son Association vise à chercher la vérité, informer et sensibiliser les populations concernées sur la défense de leurs droits dans la légalité. Aujourd’hui, cette question de promotion et de la sauvegarde de la forêt en question, située dans le cercle de Kita qui prend une grande partie du Mandé vers la frontière guinéenne, peut se faire sans que ces populations ne soient amenées à quitter sur leurs terres dont certains villages existent depuis des siècles.

Une chose est certaine, les constats faits par la délégation de l’UACDDDD démontrent clairement qu’en faisant déplacer ces villages se trouvant dans cette zone forestière, c’est de leur faire disparaitre pour toujours. Car, ils n’ont d’autres activités principales que l’Agriculture, l’élevage et la pêche. Aujourd’hui, leur retirer toutes les potentialités, toutes les richesses que la nature les ont offertes, c’est de leur prendre tout simplement la vie. Notons que la forêt en question aurait une superficie de 118 000 ha sur laquelle plus de 10 000 âmes y vivent.

Comme dit un adage « vaut mieux de voir une seule fois que d’entendre mille fois ». Cette zone forestière regorge des potentialités énormes qui contribuent naturellement au développement socio-économique de cette partie du pays. La fertilité des sols fait que les populations se sont tournées principalement vers la coton-culture qui les a rendues prospères. Mais, pour les contraindre à quitter les lieux sans aucune autre forme, l’Etat malien leur prive aujourd’hui des semences du coton et d’engrais depuis quelques années maintenant. Toute chose qui est en train de contribuer à leur appauvrissement. C’est l’idée géniale pour pousser ces populations à faire changer d’avis et ne pas pouvoir résister face à une sollicitation de déplacement des villages vers des zones où les activités agricoles seront moins possibles à exercer. En tout cas, selon des témoignages recueillis sur place dont nous vous livrerons en détails dans nos prochaines éditions démontrent clairement que ces villages sont aujourd’hui asphyxiés par le pouvoir en les privant de cultiver le coton dans la zone, principale source de revenus. A cette idée, il est aussi clair qu’on est en train de procéder à la politique de diviser pour régner dans la zone. En tout cas, ce sont les principaux constats faits par les visiteurs après avoir écouté les victimes de cette situation. Nous y reviendrons dans nos prochaines éditions, en vous livrant les différentes réactions recueillies sur place.

 

Expropriation des terres dans la forêt du Mandé à Kita

Les réactions fortes des victimes

Aujourd’hui, ils sont plus de 100 villages qui sont sommés de quitter sur leurs terres dans trois communes rurales du cercle de Kita pour cause, la promotion de la forêt naturelle située dans la partie du « Mandé » au Sud de la capitale de l’Arachide, Kita. Il s’agit des communes de Gadougou1, de Gadougou 2 et de Koulou. Inquiète de cette situation, l’Union des Associations et des Coordinations d’Associations pour le Développement et la Défense des Droits des Démunies (UACDDDD) a dépêché du 23 au 24 février une mission de prospection, d’information et de sensibilisation dans la zone. Il s’agissait aussi d’apporter son soutien et son accompagnement à ces populations, victimes d’une décision non bien réfléchie. Des fortes réactions ont été recueillies par ladite Association.

Dans le cadre de sa mission de défense des droits des démunies, une délégation de l’Union des Associations et des Coordinations d’Associations pour le Développement et la Défense des Droits des Démunies (UACDDDD) était dans la zone forestière du « Mandé » dans le cercle de Kita pour s’enquérir de la situation conflictuelle à laquelle les populations sont confrontées. Ils sont plus de 100 villages qui sont menacés de disparition à cause d’une décision non bien réfléchie. Car, il s’agit de déguerpir tous les villages situés dans ladite forêt et environs.

Pendant 48 heures, une délégation de l’UACDDDD, conduite par Siaka Traoré de la commission scientifique, et composée de Taka Méminta, chargé des affaires juridiques, Sékou Samaké et Boubacar Samaké, tous membres du bureau de ladite Association, a sillonné 04 villages des 03 communes de la localité. Partout où la délégation a passé, elle a réitéré son soutien aux populations victimes. Car, celles-ci sont unanimement d’accord qu’elles ne quitteront jamais vivantes sur leurs terres dont leurs ancêtres ont vécu il y a maintenant des siècles.

A l’occasion de ce périple, la délégation de l’UACDDDD, après avoir fait une brève présentation de l’Association, les missions qui lui sont assignées et l’objectif de sa présence dans la zone, a recueilli des vives réactions des populations lors des différentes Assemblées Générales, tenues dès l’arrivée de la délégation. Parmi les réactions, voici quelques extraits.

A Gallé, chef lieu de la Commune Rurale de Gadougou 2 :

Sinkoro Kamissoko, 76 ans

Notre village a été créé il y a maintenant 300 ans dans cette forêt. La forêt était appelée « hèrè forêt » (forêt du bonheur). Tous les villages environnants venaient se servir de sa prospérité. Mais, avec l’augmentation de la démographie, la forêt a perdu quelques potentialités parmi lesquelles quelques gros animaux. Si l’Etat veut revaloriser cette forêt, cela ne nous pose pas de problèmes, mais aller jusqu’à nous demander de quitter sur nos terres, c’est là où il y a des problèmes. Nous n’accepterons jamais cela. Il faut nous tuer d’abord pour faire déplacer nos villages.

Sokona Mady Kamissoko

Quand le blanc est venu dans la zone, en la personne de Christophe, le concessionnaire principal de la forêt, il nous a promis de rendre cette localité un paradis pour les populations. Aujourd’hui, plus de 100 villages sont réellement inquiétés de disparition. Nous ne voulons que nos terres cultivables. Que l’Etat revoit sa copie et faire en sorte que nous pouvons rester sur nos terres, puisqu’on n’a pas d’autres sources de revenus que la terre, à travers nos activités agricoles, d’élevage et de pêche.

Sabou Mady Kamissoko

Nous avons eu d’énormes difficultés avec cette situation. Aujourd’hui, on nous a privés de faire notre coton-culture tant que nous refusions de quitter sur ces terres. Alors que la culture du coton constitue nos sources principales de revenus. Celle-ci est très importante pour le développement socio-économique de la localité.

Noumou Djata Sissoko

Cette sanction qu’on nous a infligée est synonyme de la mort pour les populations de la zone. Si nos activités de coton-culture sont arrêtées, c’est la vie socio-économique de l’ensemble de la localité qui est arrêtée. Je salue l’UACDDDD pour son soutien et son accompagnement dans cette situation très compliquée pour nous. J’ai travaillé avec des allemands dans des centres forestiers à Francfort. Mais, aucun village n’a été évacué comme on nous demande aujourd’hui. Les forêts existent partout sans empêcher les activités agricoles. Pourquoi ne pas faire la même chose ici ? Si cela n’est pas possible, que le Gouvernement refuse tout simplement ce projet pour l’intérêt de sa population. Le Mali dispose des terres, mais les terres cultivables ne sont pas satisfaisantes.

Nous ne sommes pas opposés à la valorisation de la forêt, mais celle-ci ne doit pas permettre d’obliger les villages à quitter sur leurs terres. Aujourd’hui, nous sommes mieux placés pour protéger cette forêt et la mettre en valeur. Il suffit seulement de créer des conditions pour nous encadrer dans ce sens. Nous sommes prêts à aider le Gouvernement à protéger cette forêt, mais nous ne sommes pas prêts à quitter sur nos terres. Il est aujourd’hui important que le Gouvernement trouve des meilleures solutions pour que cette situation soit profitable à tous.

A Limakolé :

Le Chef de Village, M. Kamissoko

Lorsque Christophe, le concessionnaire de ladite forêt, est venu dans la localité, il a procédé à des actes de corruption. Il donnait de l’argent aux notables des villages. Il a fait des forages et financé les scolarités de certains enfants de la zone, tout en précisant qu’il n’entendait rien en retour. C’est maintenant qu’il a montré son vrai visage. Il nous demande de quitter sur nos terres et aller nous installer sur un autre site où il n’y a pas la possibilité d’exercer les activités paysannes à hauteur de souhait. Conscients de cette situation désavantageuse, nous refusons toutes autres propositions.

Yamoutou Kamissoko, conseiller du Chef de village

J’ai toujours alerté lorsque Christophe a marqué sa présence éternelle dans la zone. Il faisait de la chasse et de la pêche. Je lui ai affronté personnellement. Il a réussi à m’emprisonner et c’est dans la prison que j’ai perdu ma vision. Je suis devenu aveugle à cause de lui. Christophe a voulu m’empêcher de me créer un nouveau champ dans la zone. Nous étions deux à être emprisonnés par Christophe, mais l’autre n’a pas survécu. Il est décédé peu après sa sortie de la prison. En tout cas, c’est là où est parti tout mon malheur aujourd’hui. Une chose est certaine, Christophe ne réussira jamais à nous diviser pour atteindre son objectif. Nous allons tous mourir avant de quitter sur ces terres.

Adama Kamissoko, adjoint au Maire de Gadougou 1

J’appelle mes concitoyens à l’union sacrée. Nous sommes prêts à mourir plutôt que de céder nos terres. Nous demandons à ce qu’on nous mette dans nos droits pour qu’on puisse continuer à exercer notre coton-culture. Car, pour nous contraindre à accepter de quitter sur nos terres, on nous prive aujourd’hui des engrais et des semences du coton. Cela est inacceptable.

Dans la commune de Gadougou 1

A Galissindé :

Niéréka Kamissoko 67 ans

Notre village a été créé il y a 162 ans. On nous a sommés de quitter sur nos terres au plus tard le mois de Mai 2016 pour aller nous installer sur la colline (plateau manding) où il n’existe pas de terres cultivables. En tout cas, rien ne nous fera quitter sur nos terres. Cette situation est le fruit d’une trahison. Rien ne vaut la vérité. Nous allons mourir sur cette vérité.

A Krigagna, un village de la Commune de Koulou

Famoussa Kiabou, Chef de Village, 120 ans

Christophe est venu nous dire qu’il veut faire le maraîchage dans la zone. A notre grande surprise, nous voyons cette situation inattendue. Mais, une chose est claire, nous n’allons jamais accepter de quitter sur nos terres. Pour que cela se fasse, il faut d’abord tuer tout le monde, même les animaux. Cette situation a fait qu’aujourd’hui toutes nos activités paysannes sont arrêtées. On ne sait pas ce qui va se passer, mais, il n’est pas question d’abandonner un cm de nos terres.

Drissa Kiabou

Christophe nous a dit que l’évacuation des villages est une décision du Gouvernement sinon, lui, il n’a jamais dit de tout cela. Il est incroyable de voir disparaitre les hommes au profit des animaux puisque l’objectif est d’amener des espèces animales de tout genre dans cette forêt. Aujourd’hui, le Mali est dans une situation de crise sans précédent. Il n’est pas nécessaire aujourd’hui d’ouvrir un autre front. En nous obligeant à quitter sur nos terres, c’est de nous pousser à faire des choses que nous ne voulons pas. Certains villages disposent aujourd’hui plus de 12 000 pieds d’arbres fruitiers. Faut-il abandonner tout cela ? Difficile !

Propos recueillis par Boubacar Diarra

Georeferences

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